Reviews

INSIDE OUT

1. « This World » nous rappelle que nous n’avons plus de temps à perdre. Que le réchauffement climatique est le plus grand crime de l’humanité : notre monde se désertifie, les forêts tropicales rétrécissent sous nos yeux, les calottes glaciaires fondent, et il se trouvent des insensés, avides, sournois pour nier ce que nous avons sous les yeux.
2. « Eric Upon Tweed » est beaucoup plus enlevé, capricant, joyeux. Il s’agit d’une chanson humoristique, presque sous forme de comptine, qui raconte les déboires d’un mineur de charbon du Comté de Durham. En réalité, pour aller au fond des choses - comme le faisaient les mineurs au 19ème siècle – il s’agit autant des dures « conditions » de travail que des beuveries pour tenter d’alléger la peine et oublier l’humour corporatiste qui consistait parfois à placer un étron dans les tartines d’un nouveau (Poo in the snap) ou de lui « cirer » les testicules (greace on your chap).
3. « Long Ship » narre le retour au pays de l’équipage d’un drakkar. Les conditions météorologiques sont dures: la pluie cingle, le vent souffle de l’air glacé et, malgré les voiles gonflées, le voyage semble long qu’il s’agisse d’un retour de conquête depuis le Groenland ou L’Espagne. Les vikings laissent de nombreuses victimes derrière eux. Le ton est plus solennel, le climat plus lourd, le rythme lent, le chant presque plaintif, les instruments évoquent la fureur des éléments impitoyables à doses mesurées. Beaucoup de feeling et d’espace dans cette chanson.
4. “Horsemen” trouve son inspiration dans le film (muet) “The Four Horsemen Of The Apocalypse” (1921) de Julio MADARIAGA. Pour autant ; point de Trash Metal ni de rythmes effrénés ici, la pièce se déroule en mid tempo mais soutenu. Et pour cause : les 4 cavaliers de l’apocalypse (aux masques de mort) dont il est question ici sont l’image que s’en est faite Dave - qui fait même référence au sourire d’Adès - sortis des enfers pour détruire la vie sur terre et n’y laisser que désolation. Une impression de galop reste présente puis la flûte aide à l’introduction d’un thème différent. Il y en aura d’autres dans cette pièce à tiroirs. Une adaptation libre tout à fait remarquable.
5.”Clay Man” est ce qui subsiste d’un rêve de Will LAWERY après une consommation excessive de Wenleydale (un fromage du Yorkshire qui existe en deux versions, avec ou sans penicillium roqueforti, dont l’histoire remonte au XIème siècle avec l’arrivée de moines cisterciens venant de Roquefort! Ce met de choix, qui existe sous deux formes, a failli disparaître…) Un homme attirait les craintes et les malheurs des gens qu’il croisait sous forme d’argile humide qui s’accrochait à lui. A force de rencontrer des êtres malheureux, il était couvert d’argile et seuls ses yeux triste et bleu restaient visibles. Il est facile d’imaginer qu’il s’agissait d’argile verte.
Le texte est à la fois lyrique, imagé, triste et métaphorique.
La pièce musicale se montre rêveuse, un peu triste, plutôt intériorisée, avant un pont marqué par les claviers et une accélération de tempo…avant une accalmie flâneuse. La douceur s’installe ainsi qu’une trame déclinée par strates, avec diverses interventions instrumentales toujours surprenantes mais idéalement fondues. La montée finale, plus épique, annonce la fin. Ou la faim de réentendre l’album immédiatement? De déguster à nouveau cette délicieuse proposition musicale, se régaler d’arrangements fins, d’instrumentation dosée, de mélodies parfaites et accrocheuse, de différentes couches aux saveurs délicates…

Alain Bourguignon Plus Porg de Vous